Continent africain au vingt et unième siècle…
Methos était serré, amassé, entassé parmi les autres passagers de son wagon. Mais il n’avait pas le choix, c’était le seul moyen de parvenir à sa destination. Il jeta un coup d’œil sur le cadran de sa montre. Le voyage était encore long, il devait prendre son mal en patience. Une fois sorti de là, il récupèrerait un chameau et pourrait finir seul sa traversée du désert. Mais pour l’instant, il devait prendre sur lui et se contenter de cette odeur irrespirable de sueur, de saleté, et d’animal à l’agonie. Mais quelle idée de voyager avec un mouton dans les pattes !!! Il hésita un instant à remplacer l’ovin par de l’ origami, plus facile à transporter, mais se ravisa. Il fallait respecter les traditions. Après des dizaines de bousculades, de coups dans les côtes et d’injure sur lui et son animal, il parvint enfin à se hisser près de la fenêtre. Il dût encore se débattre avec celle-ci pour gagner un peu d’air, malheureusement lui aussi étouffant. Il ferma les yeux, laissant les souvenirs remonter à la surface.
Cinq millénaires plus tôt…
Le vent soufflait sur les dunes ensablées et cela n’avait rien de très naturel, c’était simplement le résultat du pillage de la tribu avoisinante. Methos jeta un dernier regard rempli d’ empathie sur sa femme et le fils qu’il aurait voulu lui donner. Il fit un tour d’horizon, contempla une dernière fois son domaine avant de se résigner à prendre les armes.
Akim, le fils du forgeron, vint le chercher. Les druides avaient décidé de mener le combat dans la contrée, là où tous leurs ancêtres s’étaient jadis imposés en maîtres. Les Tohu-Bohu étaient de légendaires guerriers que plus personne dans la contrée n’osait défier. Mais l'heure de défendre leurs parcelles arriva. Ils n’avaient pas le choix, ils devaient maintenant croiser le fer contre une armée de mystérieux assaillants.
Toute la tribu s’était réunie autour des grands menhirs pour invoquer les dieux afin qu'ils puissent les bénir. Les incantations débutèrent, rapidement suivies de rituels où les hommes bondissaient au rythme de chants rauques et intempestifs. Puis il y eut un moment d’accalmie durant lequel des moutons furent tondus, égorgés et sacrifiés sur l’autel. Après une ultime prière, les chefs leur donnèrent des gorgées d'hydromel, pour le courage, pour rester grands et fiers pendant la bataille. C’était la première fois qu’il partait au combat et Methos espérait être digne de la tribu de Tohu-Bohu.
Les druides, coiffés de leurs têtes de tigre annoncèrent le début de la bataille. On entendait au loin les incantations de magie, puis toute la tribu, le glaive en main, se mit à courir vers l'ennemi. La lutte devint aussi terrible que pénible pour Methos, tellement maculé par le sang qu’il ne voyait même plus ses assaillants. Il percevait juste des ombres aléatoires, tandis qu’il tranchait ses ennemis qui revenait toujours en surnombre. Ses frères, les uns après les autres, tombaient lourdement devant lui, sous le poids des armes que possédaient tous ces barbares. Ils avaient des lances, des haches et des épées. A croire qu’ils n’avaient vécu que dans l’unique but de terrasser les Tohu-Bohu ! C’est là que Methos comprit. Ils n’avaient aucune chance de survivre. Leurs adversaires avaient fait de la guerre un art, voir un métier à part entière, tandis qu’eux se reposaient sur leur mythiques fait d’armes. Fallait-il continuer ce combat déjà perdu ? Un moment d’angoisse le traversa avant qu’il ne se reprenne rapidement. Il avait foi en sa tribu. La légende voulait qu’ils n’aient qu’une seule crainte, à savoir, que le ciel leur tombe sur la tête. Alors il resserra fermement ses doigts sur la garde de son épée, fraîchement coulée pour l’occasion. Puis le voilà reparti à l’assaut dans ce désert d'Eden où s’écoulait du sang sur le sable doré. La lutte continua ainsi jusqu'au soleil couchant, de férocité extrême avec un tel acharnement. On aurait dit une bête sauvage à rugir, bondir et se débattre comme les fauves attaquant leurs proies. C’était sans penser qu’il fallait défendre la terre de ses ancêtres enterrés là, quel qu’en soit le prix.
Le son d’une corne retentit au loin. Le chef de leurs ennemis semblait rappeler toute sa horde. Avait-il compris qu'ils lutteraient même en enfer ? Et que ce désert appartenait définitivement aux Tohu-Bohu ? Les guerriers repartaient, laissant un goût de travail inachevé. Methos ne comprenait pas pourquoi ils abandonnaient si près du but, après tout le chemin qu'ils avaient fait pour en arriver là… Jusqu’à ce que son regard se pose tout autour de lui. Il sauta sur un de ses compagnons, le retourna, vérifia s’il respirait encore. Puis il passa à un second, un troisième, jusqu’à revenir à son camp et constater l’horreur du combat. Le feu se propageait de hutte en hutte, les brindilles enflammées volaient dans le ciel, et une épaisse fumée noire assombrit rapidement le ciel, comme si le volcan avait fini par s’embraser. Les femmes et enfants étaient crucifiés. Il n’y avait plus rien à sauver. Il ne restait plus que lui…
Voilà pourquoi ses doigts se sont écartés tout en lâchant ses armes. Voilà pourquoi le long de ses joues se sont mises à couler des larmes. Voilà pourquoi son glaive s’enfonça sans grand regret dans son ventre. Et surtout, voilà comment il est devenu roi de la tribu des Tohu-Bohu. Il était revenu à la vie, il était à nouveau le seul debout de sa tribu…
Continent africain au vingt et unième siècle…
Le vent soufflait toujours sur le désert africain. Methos rejoignit son ancien domaine, un brin nostalgique. Il s’était marié une bonne soixantaine de fois, et aucune ne lui avait donné de descendance. Il ne su jamais pourquoi les dieux l'avaient épargné de ce jour noir de sa longue, très longue existence. Mais pas une année ne passait sans qu’il fasse son pèlerinage, sans qu’il ne brandisse son épée, sans qu’il ne verse le sang d’un mouton au milieu de l’autel pour les remercier d’avoir toujours sa tête sur ses épaules. Methos n’était pas un grand laïque, ni un grand superstitieux, mais les respecter les us et coutumes demeurait primordial pour lui… surtout parce que c’était la seule chose qu’il parvenait à se souvenir. Et chacune des larmes de joie qui roulaient maintenant sur son visage le ramenaient des millénaires en arrière.
Dans le désert de Tohu-Bohu, il pouvait entendre les échos. Dans ce désert, résonnaient des séries de chants de guerre près des tombeaux…
Voilà comment il célébrait l’anniversaire de sa mort, l’anniversaire de son immortalité, et l’anniversaire de sa toute nouvelle existence…
Disclaimer :
L'univers et les personnages d'Highlander ne m’appartiennent pas, je n’en tire aucun bénéfice. Ils sont la propriété exclusive de MM Widen, Ryscher, Panzer et Davis.
De même, pour les paroles très largement empruntées, voir détournées de la chanson « La tribu de Dana » de Manau.